Les petites collectivités se convertissent tant bien que mal à l’“open data”


Pour dialoguer avec les collectivités de plus de 3 500 habitants, il faudra être très opérationnel et éviter les grands sujets de société qui font courir le risque de perdre les interlocuteurs. L’association Open data France* ne peut justement pas se le permettre. Missionnée fin juillet par Axelle Lemaire, secrétaire d’État au Numérique, et Estelle Grelier, secrétaire d’État chargée des Collectivités territoriales, elle doit proposer avec l'ensemble des parties prenantes les dispositifs nécessaires pour accompagner les collectivités locales qui ne se sont pas encore lancées dans le grand bain numérique de l’ouverture des données.

Certes, la loi pour une République numérique n’est pas encore votée – le Sénat doit l’entériner le 27 septembre –, mais il n’est jamais trop tôt pour bien faire. Car l’“obligation d’open data par défaut”, inscrite dans la loi, va changer la donne pour les collectivités à partir de 3 500 habitants. Aussi Open data France remettra-t-elle sa feuille de route aux deux ministres fin septembre, afin de “contribuer à la mise en œuvre de la loi dès sa promulgation”, souligne un communiqué du ministère de l’Économie.

L’association, qui rassemble les collectivités pionnières en matière d’open data, compte faire des émules, mettant à disposition des ressources communes et identifiant les structures qui serviront de supports pour les collectivités petites ou de taille intermédiaire. 

Normalisation des données et de leur format

“Sur 5 000 collectivités cibles, il y en a un peu plus de 50 qui, aujourd’hui, font de l’open data. Soit un rapport de 1 à 100 ! Et bien sûr, il s’agit des grosses, rappelle le délégué général d’Open data France, Jean-Marie Bourgogne. Là, notre mission est d’accompagner les collectivités qui ont en moyenne 20 000 habitants. Elles ont peu d’administrés et peu de moyens.”

Les propositions issues de la mission “ne prendront pas la forme d’un long catalogue”, selon Open data France. “Nous indiquerons aux collectivités comment publier simplement les données essentielles dans l'intérêt du service public.” Premier axe : la constitution d'un socle commun : “pas question que 5 000 collectivités publient des données de n’importe quel type et dans n’importe quel format”, indique l'association. 

De plus, les données produites par les collectivités qui figurent déjà dans des bases nationales seront projetées au niveau local, et un effort sera demandé sur les données strictement locales comme la vie associative, les délibérations, l'état civil, les équipements de la ville... 

Réseau national d’accompagnement

Deuxième axe : établir un corpus pédagogique, avec des supports nationaux que chaque collectivité pourra réutiliser à sa façon. Enfin, le dernier axe imaginé par Open data France sera de constituer un réseau national d’accompagnement structuré par les collectivités et les préfectures. “Les acteurs privés auront aussi leur place, indique Open data France. Ils ont déjà toute légitimité pour la mission d’accompagnement. Nous pensons à un système de labellisation pour s’assurer que le message est bien le même partout.” Il ne faudrait pas en effet qu’un conseiller s’écarte du socle commun qui aura été défini, en affirmant qu’il faut faire autrement. La latitude sera totale en revanche sur la forme que pourront prendre les interventions.

Sur le terrain, le constat est assez partagé : “Globalement, les petites collectivités ne sont pas prêtes. Quand on les consulte sur l'open data, elles sont assez démunies : « Nous ? Mais nous n’avons pas de données. Ni même de moyens d’ailleurs… »”

La mission n’est pas impossible, mais tout au moins est-elle ardue. Les représentants des collectivités estiment souvent qu’ils n’ont pas les compétences en matière de numérique et d’open data. Et pour eux, sur le sujet, la priorité est d’abord d’avoir un bonne infrastructure de téléphonie mobile et d'accès internet”, rapporte également Open data France. Il faut alors les rassurer : “Les données, nous allons vous aider à les récupérer et à les publier. Vous, vous aurez la tâche de communiquer sur ces nouvelles ressources publiques avec vos concitoyens." 

Objectif : 80 % des collectivités en cinq ans

Le mouvement de transformation de l’action publique par le numérique est sans égal et il faut à tout prix “sortir du discours de spécialistes”, analyse l'association. Il faut donc illustrer l'intérêt de l'open data par des résultats très concrets. Par exemple : « Si toutes les données des élections sont en ligne, les gens ne vous embêteront plus par téléphone ou au guichet pour les obtenir ». Ou encore : « Vous pouvez moderniser la carte de votre ville en utilisant un logiciel comme Open Street Map ». « Les archives numériques de la ville ? On va les reconstituer ensemble ! »

Open data France est aussi pragmatique que réaliste : “Certaines collectivités avanceront vite. D’autres résisteront. Si déjà, on en a un tiers la première année qui font de l’open data, ce sera bien, projette l'association. Un autre tiers la deuxième année et 80 % au bout de cinq ans et on pourra dire que le job a été fait.”

*Association présidée par le vice-président de Toulouse métropole, Bertrand Serp.


Source : ADEC - Open data